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« Le Père Goriot »

au Théâtre des Gémeaux parisiens

Depuis le 23 septembre, le Théâtre des Gémeaux parisiens accueille « Le Père Goriot », une adaptation du célèbre roman de Balzac par David Goldzahl. Dans ce tout nouvel écrin du spectacle vivant dont l’affiche est déjà très riche, le spectateur aura le plaisir de se replonger dans le Paris du XIXe siècle avec toutes ses turpitudes.

Eugène de Rastignac arrive à Paris, sans le sou, et s’installe à la pension Vauquer où il rencontre plusieurs personnes comme Vautrin, un homme mystérieux qui lui propose d’intriguer pour l’aider à monter dans l’échelle sociale, et le père Goriot, un vieil homme esseulé et désargenté. Très vite, avec le concours de Mme de Beauséant, sa cousine, Rastignac fera son entrée dans le monde et cherchera à intégrer la grande société… 


Pour interpréter une telle œuvre, il faut évidemment des comédiens à la hauteur du verbe balzacien. Monter « Le Père Goriot » avec seulement trois comédiens sur scène est une gageure dont s’empare très facilement David Goldzahl grâce au choix de ceux-ci. Delphine Depardieu, qui triomphe actuellement aussi dans « Les Liaisons dangereuses », excelle dans cette nouvelle mise en scène, en jouant les prudes, les vieilles femmes, les capricieuses, les femmes charmées… A travers cette pièce, elle dévoile plusieurs facettes de son jeu et on est ébloui par la facilité qu’elle a de passer d’un personnage à un autre, parfois simplement en changeant d’accessoire. Elle embarque le public par son charisme et sa prestance. Jean-Benoît Souilh nous donne à voir un Vautrin et un père Goriot plus vrais que nature. A la fois glaçant, pernicieux, et inquiétant en Vautrin, et éperdu, triste et naïf en Goriot, il séduit le public passionné par le monologue de fin du père Goriot. Impossible de le quitter des yeux. Il amène une attraction irrésistible sur ses divers personnages et cela en est grisant. Duncan Talhouët nous présente un Rastignac plein d’ambition, qui se perd entre ses rêves et la morale. Il incarne parfaitement la maladresse de ce personnage, capable de trahir la plus douce des femmes, de séduire pour mieux s’élever, de dépenser plus qu’il n’a mais un personnage aussi qui n’abandonnera pas un homme qu’il a vu vieillir seul en ayant tout perdu. 


La scénographie joue sur une grande structure en fond de plateau, un peu comme des vitrines, comprenant de nombreuses portes et jouant sur des effets d’ombres et lumières pour mieux représenter le réel. Si cela peut dérouter au départ, cela ouvre de grandes possibilités dans la narration pour figurer les différents lieux du récit à travers un univers en noir et blanc. On se laisse ainsi emporter dans les salons avec Mme de Nucingen, à l’opéra, ou encore dans la pension elle-même. Les costumes sont contemporains mais cela ne gène en rien le propos grâce à la cohérence avec le décor et les chansons utilisées. Au respect du grand classique qu’est « Le Père Goriot » s’ajoute alors une belle touche de modernité qui se retrouve notamment dans la façon de présenter les personnages tout au long de la pièce. Alors que le rideau s’ouvre, deux des trois comédiens vêtus de capes commencent la narration, non sans rappeler le chœur de la tragédie antique. Ils reviendront régulièrement pour apporter leurs éclairages sur les diverses situations et comme pour remettre cette histoire dans ce qu’elle est vraiment : le drame d’une société où l’élévation sociale devenait plus importante que les rapports humains. Une autre façon de montrer que la Comédie Humaine de Balzac était bel et bien plus moderne que nous ne pouvions l’imaginer. Par la suite, chaque personnage est mis en valeur lorsqu’il intervient, comme s’il devenait alors l’élément central de l’action. On joue avec le public, avec ses codes, mais on le charme aussi en ne donnant pas qu’une adaptation d’un classique célèbre mais en lui apportant une vision. 


« Le Père Goriot » est une belle réussite de théâtre avec une recherche particulièrement pertinente de mise en valeur de l’histoire et des personnages. Entre mensonges, trahisons et illusions perdues, servie par des comédiens qui donnent vie au récit, cette pièce surprend, étonne et emporte. A voir !


De : Honoré de BALZAC

Avec : Delphine Depardieu, Jean-Benoît Souilh et Duncan Talhouët

Adaptation et Mise en scène : David Goldzahl

Scénographie et Costumes : Charlotte Villermet

Lumières : Denis Koransky

Son : Xavier Ferri

Au Théâtre des Gémeaux parisiens, 15 rue du Retrait, 75020 PARIS

Du 23 septembre 2024 au 31 décembre 2024

Les lundis et mardis* : 21h

*Sauf mardi 31/12 : 18h

À partir de 11 ans

Tarifs : de de 19€ à 38€

https://www.theatredesgemeauxparisiens.com/le-pere-goriot   

Durée : 1h30

 

Article : Audrey

09/10/2024

audrey@laruedubac.fr


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